Compte rendu des Six Heures pour la Palestine,
à Evry le 27 novembre 2010

Avec plus de 300 participants, les Six Heures pour la Palestine, à Évry le 27 novembre, ont été comme les années précédentes un moment très riche d'information, d'échanges et de débats. Les Six Heures se sont tenues comme l'an dernier à la Maison Départementale des Syndicats, à l'invitation des unions départementales CGT et FSU de l'Essonne, à l'appel de 29 associations partenaires du Collectif Palestine Evry Essonne, et avec la participation de plusieurs autres mouvements de solidarité avec la Palestine.

lancement des Sx Heures avec nos partenaires

Nos Six Heures se sont ouvertes en présence de Hervé Leblanc de la CGT, d'Alain Goiny de la FSU  et de François Vaillé de la Maison du Monde et ont permis aux associations partenaires de solidarité avec le peuple palestinien  d'exprimer fortement leur implication aujourd'hui: Artisans du Monde pour sa campagne de promotion des dattes de Palestine en cette période de fêtes, les Amis du Théâtre de la Liberté de Jénine pour l'organisation d'une tournée théâtrale de jeunes de Jénine en Juillet 2011, la CCIPPP pour son implication forte au sein du Collectif pour une paix juste dans le montage de l'initiative "un bateau français pour Gaza" qui doit se concrétiser en avril 2011, l'UJFP à travers un témoignage au retour de Palestine d'une mission civile composées "de juifs et d'arabes de France" qui appelle à participer activement à la campagne BDS.

Evry Palestine rappelle que cette campagne s'inscrit comme acte citoyen de dénonciation de la colonisation ; c'est un appel à la solidarité et à l'exigence du respect du droit par Israël ; Evry Palestine exprime sa solidarité avec tous les militants poursuivis dans le cadre de la campagne BDS.

lancement des Sx Heures avec nos partenaires


Retours de Gaza et témoignages de nos amis de Gaza

Puis la séquence sur Gaza.dans laquelle s'implique Evry Palestine, qui a été à l'initiative du jumelage-coopération d'Evry avec le camp de réfugiés de Khan Younis, avec lequel Evry Palestine continue à mener des projets en coopération avec des ONG palestiniennes. Toute la population de Gaza est assiégée, enfermée et pourtant elle résiste et vit:
Roland Lombard, président du CICUP, qui s'est rendu Gaza dans un congrès scientifique, a témoigné de la résistance des étudiants et professeurs palestiniens, qui ont réussi dans ces conditions un congrès de bonne tenue scientifique.
Christophe Denantes, médecin, a témoigné sur les missions qu'il mène avec le professeur Oberlin,  l'importance de cette chirurgie réparatrice, la compétence des médecins et chirurgiens palestiniens qui se forment à travers ces missions pour suppléer aux carences et soigner les blessures.
Ceux de  nos amis de Gaza : Selma, Fuad, Najma, Ziad, sur le blocus qui se prolonge, le travail que parvient à faire l'UNRWA, les conséquences du blocus dans tous les domaines de la vie, l'enfermement, mais aussi la volonté de vivre, de résister, de continuer à étudier.

Le lancement de l'opération "Un bateau français pour Gaza" à Evry et en Essonne

Face à ce constat, nous avons lancé à Evry, l'initiative " Un Bateau français pour Gaza", comme partout en France à l'appel de 60 organisations du Collectif National et de la Plateforme des ONG pour la Palestine. Nous l'avons fait devant la maquette symbolique de bateau que nous avions préparée, en présence et avec la participation de Jamal Zahalka et de plusieurs organisations de notre collectif Palestine Evry Essonne. Nous l'avons fait en rappelant les mots d'ordre de la campagne nationale, pour dénoncer et briser le siège israélien de Gaza, pour promouvoir et faire respecter le droit international :

lancement de l'opération "un bateau français pour Gaza"


Parce que nous refusons de voir 1 million et demi de personnes sous blocus ;
Parce que la communauté internationale doit imposer la levée totale du blocus de Gaza ;
Parce que nous n’acceptons pas que nos États se contentent de paroles jamais suivies d’actes ;
Parce que la première Flottille de la liberté a montré qu’une action citoyenne peut rompre le mur de l’indifférence.

Notre thème central : les Palestiniens d'Israël

Nous avions centré les Six Heures cette année sur le thème "Les Palestiniens d'Israël". Jamal ZAHALKA, dirigeant du parti Balad (gauche laïque) et député à la Knesset, était notre invité sur ce thème, ainsi que Yaël LERER, militante du même parti.
 amal Zahalka et Yaël Lerer
Israël compte 15% de palestiniens, soit 1,3 millions de personnes, qui sont citoyens de ce pays. Déjà spoliés d'une grande partie de leurs terres depuis 1948, déjà discriminés dans leur accès à l'emploi, ils vivent en ce moment une période particulièrement tendue. Il ne se passe pas une semaine sans qu'une nouvelle loi raciste soit présentée ou votée à la Knesset. Ainsi, la loi sur les communautés, véritable loi d'Apartheid, qui permettra aux petites villes de choisir leurs nouveaux habitants sur leurs propres critères... Sans compter la situation surréaliste de couples mariés entre Palestiniens d'Israël et de Cisjordanie, qui n'ont plus le droit de vivre ensemble !
Le parti Balad a été créé il y a 20 ans sur le principe "un Etat pour tous ses citoyens". Il compte trois députés à la Knesset, dont Jamal ZAHALKA et Haneen ZOABI, qui participait à la flottille pour Gaza sur le bateau Avi Marmara. Il agit dans des conditions difficiles, sa participation aux élections est à chaque fois contestée par le pouvoir, son ancien dirigeant Azmi Bishara a été contraint à l'exil, Haneen Zoabi s'est vue retirer une partie de ses droits de députée à la suite de sa participation à la flottille...
Parti indépendant, le Balad entretient des relations avec les différents partis palestiniens, même si c'est de plus en plus difficile avec le Mur et les restrictions de circulation. Il soutient la résistance non armée comme à Bil'In, était dans la rue contre l'agression israélienne à Gaza (100.000 manifestants) et se mobilise fortement contre le blocus.
Les droits individuels et collectifs des Palestiniens d'Israël, qui demandent l'égalité et leur reconnaissance en tant que minorité, sont plus que jamais partie intégrante de toute solution au conflit israélo-palestinien.

L'intervention de Jamal ZAHALKA était précédée d'une séquence d'extraits de films et courts métrages montée et commentée avec talent par Ariel CYPEL, directeur artistique de Confluences. Nous ont été donné à voir les discriminations  et la situation d'Apartheid dont sont victimes les Palestiniens en Israël  au quotidien dans plusieurs situations: le bus à Jérusalem, le travail de l'autre coté du Mur, le mépris face à l'arrivée de nouveaux arrivants palestiniens dans un "lotissement".... Tous ces films sont connus en Israël,dans les circuits artistiques et intellectuels,sont diffusés mais n'ont pas d'impact sur la population israélienne,victime de l'autocensure.

La situation des travailleurs palestiniens en Israël

Nous avions également invité Arafat AMRO, Palestinien, représentant pour le Nord de la Cisjordanie de Kad LaOved. Cette ONG israélienne milite pour l'égalité des droits de tous les travailleurs discriminés en Israël et dans les colonies israéliennes des Territoires occupés.
Arafat a témoigné de la situation complètement discriminatoire des Palestiniens : 20.000 travaillent avec un permis en Israël, dans la construction et l'agriculture, 25.000 travaillent avec un permis dans les colonies de Cisjordanie et plus de 10.000 sans permis, principalement dans les colonies agricoles de la Vallée du Jourdain.
Les salaires dans l'agriculture sont le tiers du salaire minimum obligatoire, dans l'industrie les 2/3. Il y a souvent "séparation" (WC distincts, pas de cantine pour les Palestiniens...).
Le travail est dangereux et sans protections (pesticides, produits chimiques...).
Les accidents du travail ne sont pas reconnus et les Palestiniens blessés se débrouillent alors pour franchir les barrages et rejoindre l'hôpital palestinien le plus proche...
Kad LaOved travaille (souvent avec les syndicats palestiniens) pour faire prendre conscience aux salariés de leur situation et les soutient lors d'actions en justice qu'ils engagent pour faire reconnaître leurs droits.

Un débat sur la situation et la stratégie du peuple palestinien

Le débat final, avec Bernard Ravenel, historien et président de la Plateforme des ONG pour la Palestine, Jamal Zahalka, Yaël Lerer, Arafat Amro, et Safwat Ibraghit, conseiller auprès de l'ambassadeur de la Palestine en France, avait pour thème: "Quelles perspectives aujourd'hui pour les peuples palestinien et israélien ? Quelles actions ici pour le respect du Droit ?"
Nous avons principalement traité des obstacles à la paix, de la stratégie du peuple palestinien, des attentes vis-à-vis du mouvement de solidarité.
Pour Bernard Ravenel, un des principaux obstacles à la paix est le déséquilibre des forces, avec la puissance militaire considérable de l'Etat d'Israël, et les coups très durs pris par la résistance palestinienne depuis le début des années 2000. Jamal Zahalka estime que l'Etat d'Israël n'est aujourd'hui pas mûr pour la paix, le pouvoir continue à se "droitiser" et à mettre tous les obstacles possibles à la paix, et les réactions de solidarité des citoyens juifs d'Israël sont très faibles.
Le débat s'est alors engagé alors sur la stratégie pour le peuple palestinien aujourd'hui. Safwat Ibraghit a assuré que les négociations en cours n'impliquaient aucun renoncement aux droits du peuple palestinien, Jamal Zahalka estimant, lui, que ces négociations affaiblissent la position du peuple palestinien. Pour lui, la solution à deux Etats est morte, celle à un seul Etat n'existe pas encore de manière crédible, en attendant il faut se battre pour l'égalité des droits.
Arafat Amro a donné sur ce point sa position personnelle, de citoyen palestinien engagé, vivant sous occupation et ayant comme beaucoup d'autres passé plusieurs années en prison: il croit encore à la solution à deux Etats, si elle est soutenue par un mouvement populaire palestinien, par des positions fermes des pays arabes et de la communauté internationale. Il a rappelé l'importance de l'unité du peuple palestinien, et indiqué que, si tout le monde est d'accord sur le mot "résistance", les avis divergent sur les modalités de cette résistance. Tout en rappelant que c'est l'affaire du peuple palestinien, Bernard Ravenel a donné, pour sa part, quelques points de repère essentiels:
- s'appuyer sur la légalité internationale, principale force des Palestiniens;
- les négociations doivent partir des résolutions de l'ONU qui constituent le Droit, elles ne doivent pas avoir pour objet de discuter ce Droit ;
- il n'y a pas de négociation sans résistance, pas de résistance sans négociation ; aujourd'hui, la négociation a échoué, mais la résistance armée aussi ; la résistance non armée est la seule capable de réaliser l'unité des Palestiniens,
- toute stratégie doit être soutenue par l'opinion publique mondiale et rechercher le soutien des Etats dans le monde.

La solidarité du mouvement citoyen plus que jamais nécessaire

Yaël Lerer, en tant que militante juive israélienne du parti Balad, et en tant que militante de la Coalition des Femmes pour la Paix, a rappelé d'abord que la solidarité internationale doit s'appuyer sur une vision claire du côté palestinien : on cherche la manière de vivre ensemble. Elle a rappelé la responsabilité politique du mouvement de solidarité en France, qui est de s'opposer à la politique du Président de la République qui soutient inconditionnellement l'Etat d'Israël. Elle a rappelé toute l'importance dans ce contexte de la campagne BDS, soutenue aussi en Israël par la Coalition des Femmes pour la Paix qui animent le site internet "Who Profits ?"

Plus que jamais, la mobilisation citoyenne, dont les Six Heures pour la Palestine sont une expression forte, doit jouer un rôle essentiel pour une paix réelle fondée sur le respect du Droit.